On ne le répétera jamais assez : si le temps est évidemment un paramètre décisif dans la réussite d’un devoir écrit, rien ne justifie de transformer l’exercice en une course contre la montre. Quel comble que de prendre pour adversaire cet inoffensif bracelet à aiguilles dont la régularité rotative ne vous a jamais fait défaut, contrairement à ce que vous avez souvent pu croire (sauf panne, bien évidemment) ! Quel comble en effet, dans la cohue des signes sommes, entre les assauts des cosinus et des exponentielles, ou dans la gueule d’un théorème dont il ne faut oublier aucune hypothèse sous peine d’encourir l’encre rouge rage du correcteur ! Parmi tout ce beau monde, les tic tac réguliers de votre montre ne sont pas l’ennemi : elles ne font qu’irriguer votre esprit et votre copie de cette eau temporelle nécessaire au bourgeonnement des idées, puis à leur floraison sur vos feuilles.
Considérez-vous donc non point comme adversaire du temps – ou vous risquez, pour continuer sur la métaphore aquatique, de lutter à l’épuisement contre le courant – mais comme son gestionnaire. Hissez-vous à cette hauteur-là, et vous serez Roi de la contrée du Devoir, avec à votre disposition un fleuve dont il faut répartir judicieusement l’irrigation. Si vous redistribuez cette ressource avec trop de parcimonie, en vous montrant économe à l’extrême, chaque question n’en reçoit que très peu. Vous avez beau toucher à toutes les questions, les toucher ne suffit pas pour provoquer ladite floraison. À l’inverse, consacrer injustement la totalité de ces ressources à une poignée de favorites risque d’entraîner le reste de la contrée dans une sécheresse mortifère. Bien entendu, cela n’interdit pas d’allouer prioritairement ces ressources à des questions dont on sent le caractère central, ou dont la technicité calculatoire est propice aux erreurs d’inattention.
Pragmatiquement, faut-il plutôt s’appesantir sur chaque question traitée ou activer le mode grappillage de points ? La réponse dépend du profil de l’élève : s’il vous arrive souvent d’avoir l’impression d’avoir fait « beaucoup de choses » pour ensuite subir la surprise d’une mauvaise note, vous allez probablement trop vite et gagneriez beaucoup à vous appesantir un peu plus sur les questions traitées, pour gagner en rigueur, étoffer votre argumentation et faire plus attention aux erreurs. Si au contraire, vous faites partie de ceux qui se décriraient ainsi : « je fais peu mais ce que je fais, je le fais bien », vous auriez sans doute intérêt, sans perdre la qualité des questions que vous traitez, à vous entraîner à une plus grande vitesse (notamment sur le plan calculatoire), et à agrémenter votre devoir de quelques points glanés par-ci par-là, en traitant des questions faciles de parties que vous n’auriez peut-être même pas regardées. Et à la masse d’élèves qui se situeraient entre ces deux catégories, un conseil bateau pour clore la métaphore du fleuve : ne pas s’acharner trop longtemps sur une même question si l’on n’en voit pas les fruits, mais ne pas non plus s’interdire de dépasser légèrement le temps qu’on lui aurait allouée en temps normal, si l’on sent qu’elle s’apprête à tomber.